Jeter un oeil au compte twitter de l’Élysée est un bon moyen de récapituler les « messages présidentiels » envoyés hier soir dans le dernier #sarkoshow en date. Quelques commentaires.

Crise européenne

« S’il n’y avait pas eu d’accord hier soir, ce n’était pas seulement l’Europe qui sombrait, mais le monde »
« Si la Grèce était tombée en faillite, un processus en cascade aurait emporté tout le monde »
« Si la France et l’ Allemagne n’avaient pas marché du même pas, l’Europe n’aurait pas résisté »

=> On sur-dramatise la situation, et on se place en sauveur du monde. Mais pas en économiste : un pays ne peut pas faire « faillite », il peut faire défaut, mais bon, c’est moins spectaculaire comme mot. On se place pas non plus dans le long ni le moyen terme : avec l’accord conclu, la zone euro gagne un peu de temps, encore, mais la fin est proche, et pendant ce temps tout le monde s’enfonce, sauf les banques et les spéculateurs.

« Il fallait permettre aux Grecs de pouvoir rembourser cette dette »
« La dette bancaire de la Grèce est passée de 200 milliards à 100 milliards d’euros grâce à l’accord d’hier »
« La Grèce peut se sauver, mais elle doit faire des efforts, se réformer »
« La France a prêté 11,5 Mds d’euros à la Grèce. Ce prêt n’a rien coûté aux Français. Il a rapporté 200M euros d’intérêts »

=> Quand la crise a éclaté en Grèce, on aurait pu résoudre le problème immédiatement, ça n’aurait pas coûté grand chose. Mais non, on a préféré cassé du sucre sur nos amis grecs : on prête un peu, on ramasse des intérêts, et on fait s’enfoncer le pays dans la dépression, bien fait pour eux, ces satanés sudistes qui ne savent pas gérer leurs comptes !… Aujourd’hui, notre Président a l’air d’en être fier, et avec sa collègue allemande, face à la crise qui se propage et les pays qui sont prêts à tomber les uns après les autres, quelle solution ils nous trouvent ? La rigueur ! Bah oui, ça marche tellement bien en Grèce, généralisons, règle d’or pour tout le monde, crevez de faim et l’euro survivra.

Dette française

Depuis 1974, la France n’a pas voté un seul budget en équilibre
La France dépense 49 milliards d’euros chaque année pour payer les intérêts de sa dette

=> Petit historique de la dette et du déficit (sans commentaire) :

La faute à la gauche

« Si les salaires et les pensions n’ont pas baissé, c’est parce que nous avons fait la réforme des retraites à temps »
« Quand j’ai fait la réforme des retraites, tout le monde m’est tombé dessus. A un moment, il faut faire son devoir »
« La réforme des retraites a protégé la France et les Français »

=> La réforme des retraites en question était idéologique. Elle se basait sur des estimations démographiques surréalistes pour se justifier. Et quand bien même il y aurait un grave problème de financement de notre régime de retraites, d’autres solutions existent que la régression sociale que constitue l’augmentation continue de l’âge légal de départ à la retraite. Le pays a beaucoup débattu de ces questions, mais il faudra à nouveau ressortir ses arguments durant la campagne, car la droite n’est pas prête de lâcher le morceau, elle veut que l’on travaille plus longtemps. Mais au fait, au-delà des questions de progrès social, c’est bien gentil de vouloir nous faire bosser jusqu’à 67 ou 70 ans, mais il est où au juste le travail ?

Pendant la crise, les pensions et les salaires n’ont pas baissé en France, contrairement à d’autres pays européens
« Si les salaires et les pensions n’ont pas baissé, c’est parce que nous avons supprimé 150 000 postes de fonctionnaires »
« Entre 1990 et 2007, la France a embauché 1 million de fonctionnaires »
Au moment où les 35h, qui ont ruiné la compétitivité de la France, ont été créées, l’Allemagne faisait le choix de l’emploi
« La folie des 35h a été payée par les ouvriers et les salariés les moins formés »
Exonération des heures sup = 9M de Français qui ont gagné en moyenne 450 euros de plus »
« Nous voulons garder notre modèle social Français : emploi, santé, retraites »
« Si l’on veut défendre notre modèle social, il faut accepter de prendre les mesures courageuses nécessaires »
« Nous continuerons de réduire le nombre de fonctionnaires »
« Si on veut embaucher 60 000 fonctionnaires de +, où va t-on trouver l’argent? C’est l’argent des Français »
« Moins d’enseignants, mieux payés, mieux formés, mieux considérés, mieux respectés, c’est la seule politique possible »

=> On reste dans la banalité : c’est la faute aux 35 heures et aux fonctionnaires, à la gauche. On appréciera la totale incohérence de base : je veux protéger notre modèle social, mais je veux continuer à supprimer les fonctionnaires ; je rappelle que les fonctionnaires, ce sont les gens qui essayent de trouver un emploi aux chômeurs (les agents du Pôle Emploi ont en moyenne 200 dossiers à gérer, soit le taux le plus élevé en Europe), qui s’occupent de votre santé, qui éduquent vos enfants ou vos frères et soeurs, qui garantissent votre sécurité, et j’en passe… Allez, on les vire ! Mais on garde notre modèle, si si.

Une vision incohérente

« Il n’y aucune raison que les contribuables réparent les erreurs commises par les marchés financiers »
« Après le G20, nous déciderons des mesures supplémentaires d’économie à mettre en oeuvre »
Réforme de la fiscalité : il faut réfléchir à la convergence de notre fiscalité avec l’Allemagne
« Nous sommes le pays d’Europe qui a les impôts les plus élevés d’Europe »

=> Que de contradictions : les contribuables ne doivent pas payer… mais on vous prépare un nouveau plan d’austérité ; et puis, par dessus le marché, on va démineur les cotisations patronales et toutes ces choses qui, c’est bien connu (à droite), « pèsent sur notre compétitivité » (ça méritera sans doute un autre petit plan d’austérité pour compenser) ; et puis, avec 20% de travailleurs pauvres, l’Allemagne est vraiment un modèle à suivre, bien sûr.

« L’Europe ne peut pas être la grande naïve dans la compétition économique internationale »
« Le protectionnisme est une très mauvaise chose »
« Pourquoi ne pas accepter que les Chinois fassent confiance à la zone euro? »
« La question de l’intégration du yuan dans le système monétaire est incontournable »

=> Que de contradictions, encore. N’est-ce pas le plus grave témoignage de naïveté que cette soumission de l’Europe à la Chine à qui on demande aujourd’hui de nous prêter de l’argent, et ainsi s’interdire tout protectionnisme européen, toute défense des intérêts économiques de nos nations, alors même que la Chine elle-même est protectionniste ? Ces prises de position sont particulièrement graves.

Je vais bien, tout va bien (Carla et Giulia aussi d’ailleurs, merci Pernaut d’avoir pris de leurs nouvelles)

Nous sommes le seul pays au monde où le Plan de soutien aux banques a rapporté de l’argent et sauvé les épargnants
« Je le dis aux déposants et aux épargnants : vous pouvez avoir confiance en la solidité de vos banques »
« La France peut réussir, dans l’industrie aéronautique, automobile, dans tous les secteurs »
La France atteindra les 1,75% de croissance pour l’année 2011.
Grand Emprunt : déjà 19 Mds d’euros engagés sur les 36 Mds d’euros prévus
Investissement : depuis 25 ans 1 LGV par an. Cette année : 4 LGV construites de front
Suppression de la taxe professionnelle = 6 Mds de charges en moins pesant sur nos usines

=> Après avoir sur-dramatisé la crise de la zone euro pour se poster en sauveur du monde. Après avoir bavardé sur la dette et la « gestion rigoureuse ». Voilà que Nicolas Sarkozy revient à un discours d’espoir, il n’ose pas se poster en candidat de la rigueur, alors que c’est la seule chose qu’il nous prépare… Quant à l’investissement, je veux bien, mais pourquoi avoir eu besoin de faire un grand emprunt pour faire des investissements d’avenir en milieu de mandat ? Parce qu’on avait liquidé tout notre budget dans des cadeaux fiscaux, qui ont pour effet, pour le coup immédiat, d’accroitre les inégalités dans notre pays.

Je suis candidat, mais le dites pas

« Moins d’assistanat, plus d’investissement, c’est ça la martingale gagnante »
Karachi: « Je trouve odieux que l’on utilise la douleur des familles pour servir à des magouilles dans le but de salir les gens »
« Les Français attendent que leurs responsables politiques fassent leur travail »
« Tous les candidats du système ont été battus. Tous »

=> Après s’être posté en Président au travail (même s’il regarde Borgia – oui oui, notre chef d’État a cité la série de canal au milieu d’un argumentaire économique), sauveur du monde, il résume la ligne directrice de son « programme » et se poste pour finir en victime (vous êtes méchants avec vos affaires…) et en outsider (alors qu’il est le Président sortant, qui plus est après 10 années de droite au pouvoir). Les ficelles sont à peine grosses…

 

[Édit] On m’informe qu’une vidéo insultante a été publiée à la fin de cet article par un pirate. Je crains de ne pas pouvoir la supprimer. Toutes mes excuses aux âmes sensibles.

Une réponse sur « Ah si tu pouvais fermer… »

  1. Finalement vous faites fi de l’objectivité qui vous tracassait tant dans l’article précédent ?! En effet notre président souffle le chaud et le froid donnant un aspect flou à qui ne sait pas regarder sur la situation mondiale actuelle, sa future campagne, et la valeur des ses actes et ses paroles en ce moment si on les compare à son quinquennat. Un petit regret c’est le « sans commentaire » associé à ces deux graphiques tellement parlant. Il faut commenter ce qui nous saute au yeux, après une stabilisation de la dette et une réduction énorme du déficit en 5 ans du gouvernement Jospin, deux quinquennat et notamment celui de monsieur Sarkozy auront suffit à dégrader de façon désastreuse l’état de la France et de sa dette.

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