Cette semaine, la lecture de Marianne, des Inrockuptibles et de Politis, donne un sentiment de saut dans le temps, mais en arrière, dans le passé.

Marianne fait beaucoup d’Histoire, avec une Une sur ce dont « la France doit s’excuser ». L’hebdomadaire parle aussi du « modèle suédois », qui était à la mode il y a quelques années mais auquel les socio-libéraux du gouvernement se raccrochent encore.

Politis titre « Au secours, la droite revient ! », pour parler… de François Hollande et de Jean-Marc Ayrault, en Une. Si l’UMP court après le FN, les socialistes au pouvoir seraient désormais franchement passés du côté obscur de la force.

Les Inrocks enfin. Ils offrent à nouveau leur Une à Lana del Rey, pour la réédition de « Born to die » (enrichi). La chanteuse, dont la popularité a plutôt reculé, avait déjà fait la couv’ de l’hebdomadaire début janvier.

 

MARIANNE RACONTE LES CRIMES DE L’HISTOIRE

« De quoi la France doit-elle s’excuser ? » C’est la question posée par Marianne dans son n°813, paru aujourd’hui. La rédaction publie un dossier très fourni (23 pages) sur les crimes de l’Histoire de France depuis le Moyen-Âge. Au programme : les protestants massacrés à la Saint-Barthélemy, la Terreur et la répression en Vendée, l’esclavage jusqu’en 1848, la campagne napoléonienne de Russie, la colonisation (et la décolonisation), la guerre 14-18 et ces poilus dont certains considèrent qu’ils étaient des « victimes » agissant « sous la contrainte », le « tabou » du rôle de De Gaulle sous Vichy,…

Le dossier se termine par un papier d’Élie Barnavi : « Contre la repentance, pour la reconnaissance ». Elle écrit : « Par quelles voies mystérieures en est-on venu à exiger, et obtenir, la repentance d’individus et de collectivités pour des méfaits qu’ils n’ont point commis ? Par un curieux retour d’une société supposée ‘sortie de religion’ à l’injonction du Dieu jaloux qui ‘puni[t] la faute des pères sur les enfants, les petits-enfants et les arrière-petits-enfants’ (Deut., 5, 9) ? »

 

DUPERIE DU SOCIAL-LIBÉRALISME ET PIÈGE DU MODÈLE SUEDOIS

Cette semaine, il faut des intervenants extérieurs à la rédaction pour rentrer franchement dans le lard de la politique économique de François Hollande. D’abord Laurent Mauduit, qui dénonce « la duperie sociale-libérale » en page 43. Le journaliste de Mediapart, conscient que le candidat François Hollande ne mettait pas la barre « à gauche toute » (réduction du déficit à 3% dès 2013 au lieu de 2014 selon le PS ; prises de distance avec la « révolution fiscale » programmée par le parti ; modération sur l’augmentation des salaires), a cru qu’il l’avait tout de même mise « à gauche » (taxe à 75% ; « Mon ennemi, c’est la finance ! »), mais se rend compte désormais que nous avons été « dupés ».

Pourquoi ? Car les inspirations de la politique économique du Président Hollande « ont beaucoup de points communs avec les brûlots libéraux ». En cause : le pacte de compétitivité ; mais aussi la « réforme de l’Etat » qui devrait ressembler à la RGPP ; et la réforme du marché du travail, qui devrait se traduire par une augmentation de la flexibilité des salariés, alors qu’en 1981, les socialistes estimaient que « le CDI redeviendra la base des relations du travail » (22e des « 110 propositions » de François Mitterrand ».

Ce tournant de la flexibilité renvoie au modèle économique suédois et à la « flexisécurité » scandinave, un équilibre entre la facilité à licencier et celle à retrouver un travail (d’où les discussions actuelles sur la « sécurisation des parcours »). Problème : ce modèle répond à des particularités culturelles et démographiques ; il n’est pas transposable en France. C’est pourtant bien le modèle qui fait rêver les élites formées il y a trop bien longtemps et qui nous gouvernent. Le premier ministre Jean-Marc Ayrault est un adepte. En page 26, Hervé Natan analyse ce qui ressemble à « un piège pour la gauche ».

 

HOLLANDE ET AYRAULT SONT-ILS DE DROITE ?

« On ne demande qu’à être rassuré », écrivait Denis Sieffert, directeur de Politis, au lendemain de l’élection de François Hollande. Rassuré quant à « la volonté de ceux qui accèdent au pouvoir de livrer bataille » contre le libéralisme. Désormais c’est clair : non, Politis n’est pas rassuré. Pire, l’exécutif socialiste n’aurait pas une action conforme à cet adjectif. Avec François Hollande et son premier Ministre Jean-Marc Ayrault, « Au secours, la droite est de retour ». C’est la Une de l’hebdomadaire cette semaine.

La charge est massivement développée dans ce numéro :

  • L’édito de Denis Sieffert qualifie Hollande de « contorsioniste ».
  • Dans les pages économiques et sociales, Michel Soudais considère qu’avec son pacte de compétitivité, « Hollande réhabilite Sarkozy », et que Laurence Parisot, président du Medef heureuse, « ne s’y est pas trompée ».
  • Thomas Coutrot démonte, tout en ironie, l’idée que ce pacte serait « résolument de gauche » (des propos de Jean-Marc Ayrault, dans lesquels l’économiste voit une sorte de conquête du mont « Everest du mensonge politique »). Il écrit : « Face à une gauche qui la copie aussi servilement, la droite jubile, hésitant entre apitoiement et hystérie. »
  • Jean-Vincent Placé, numéro deux d’Europe Ecologie-Les Verts, est interviewé par la rédaction. Citation en titre : « C’est un virage libéral clair et fort ».

LES INROCKS DRAGUENT LANA DEL REY

La Une des Inrockuptibles a un goût de déjà vu cette semaine. On y trouve Lana Del Rey, « héroïne 2012 » selon l’hebdomadaire. La chanteuse qui fait la moue avait déjà eu cet honneur le 4 février dernier, lors de « la naissance d’une icône ». S’il y a des déçus de ses performances en live ou de sa sur-médiatisation, la rédaction des Inrocks reste fan. Un entretien exclusif est ainsi joliment titré « L’année Del Rey ». Stephane Deschamps écrit : « Depuis quelques mois, Lana Del Rey a rejoint le monde des grandes bateleurs de la pop marketée. […] Elle est aussi devenue l’égérie de H&M. Et contre nos principes éthiques les plus élémentaires, on l’adore dans la pub pour la marque de prêt-à-porter [.] Lana Del Rey surjoue la godiche. Mais son petit sourire indique qu’elle n’est pas dupe, qu’elle n’est pas celle que vous croyiez. »

 

A LIRE AUSSI DANS LES INROCKS

Retour encore avec un nouvel éclairage sur la question du mariage gay (largement traitée la semaine dernière), vue du côté de la droite. C’est en pages 24 à 26.

 

La droite justement, à travers Jean-François Copé en campagne pour la présidence de l’UMP, ferait revivre la fin de campagne présidentielle de Nicolas Sarkozy, extrême-droitisante : lisez, en pages 20 à 23, les explications en forme de reportage.

 

Bonne lecture !